jeudi 25 juillet 2013

Brésil journée de grève du 11 juillet, un article de notre hebdomadaire Lutte Ouvrière de cette semaine

Brésil : une journée de luttes réussie

Le 11 juillet, une dizaine de jours après le début des vacances d'hiver et la fin des grandes manifestations du mois de juin contre les hausses des transports, les confédérations syndicales appelaient à une journée de lutte avec grèves et manifestations.
     L'appel a été entendu : plusieurs millions de grévistes, et pas seulement dans la fonction publique, plus de 80 autoroutes et voies à grande circulation bloquées, le port de Santos, le plus important de l'Amérique latine, paralysé tout comme le complexe industriel et portuaire de Suape (75 000 salariés) dans l'État de Pernambouc. Le mouvement a également touché des raffineries et des grands chantiers ou des usines automobiles, comme Ford ou Volvo.
    De grandes villes ont connu une vraie grève générale, en particulier dans les transports publics, comme Belo Horizonte ou Porto Alegre. Dans cette dernière, les étudiants occupaient depuis la veille les locaux de l'assemblée municipale. Ils ont obtenu au bout d'une semaine le dépôt de deux projets, l'un instituant la gratuité des transports en bus pour les étudiants et les chômeurs, l'autre l'ouverture des comptes concernant les transports municipaux. Il reste à les faire voter, mais la mobilisation continue pour la gratuité totale des transports sur la ville.
      Cette journée de lutte, la plus importante depuis une vingtaine d'années, a marqué le retour en scène de la classe ouvrière. Les intentions des centrales syndicales sont diverses et en général modestes. Ainsi la CUT, liée au Parti des travailleurs et au gouvernement, reste vague et prône un « dialogue avec la société ». Força sindical, plutôt liée à l'opposition de droite, se prononce pour des changements économiques et pour une lutte contre l'inflation. Ces confédérations veulent surtout rappeler qu'elles sont là. Elles ont appelé à une nouvelle journée de mobilisation le 30 août, en précisant à nouveau qu'il ne s'agit pas d'un appel à une grève générale.
      Quant au gouvernement, il a du mal à reprendre la main. La présidente Dilma Rousseff, dont la popularité au cours du mois de juin est tombée de 60 à 30 % dans les sondages, a voulu frapper fort en proposant une réforme du système électoral et du financement des partis. Elle dit vouloir des majorités parlementaires plus stables (une trentaine de partis sont représentés au Parlement brésilien), et plus de transparence et d'honnêteté dans la vie politique, secouée par d'innombrables scandales. Elle a été sèchement rembarrée par les partis sur lesquels elle s'appuie, qui sont le produit de ce système électoral et se nourrissent de financements douteux. Elle parle maintenant de résoudre les problèmes de la santé, mais il semble qu'elle voudrait avant tout soigner sa popularité, à un an de l'élection présidentielle d'octobre 2014.
     Certains, dans le Parti des travailleurs et dans le pays, parlent d'un retour de Lula. L'ex-syndicaliste a présidé le pays de 2003 à 2010 dans une longue période de prospérité économique. Sa popularité est intacte et il en joue, faisant remarquer avec bonhomie que les mobilisations récentes sont le résultat de la réussite économique du pays et qu'il est naturel que plus de jeunes mieux éduqués réclament de meilleures conditions de vie.
     La situation économique et sociale du pays ne dépend pas du talent ou de la maladresse des gouvernants. Dilma Rousseff jouissait d'une popularité à peu près égale à celle de Lula, jusqu'à la crise des transports en juin. Il semble bien que la crise mondiale soit en train d'atteindre durement le Brésil et que la classe ouvrière se mobilisera pour refuser d'en payer la facture.

                                                                                 Vincent GELAS

Route bloquée par les grévistes à Sao Paulo le 11 juillet

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