Le 50e
congrès de la CGT :
Lepaon vise les salons plus que les manifestations
Le
cinquantième congrès de la CGT
qui s'est tenu du 17 au 22 mars à Toulouse s'est conclu, comme prévu, par
l'élection de Thierry Lepaon, qui succède ainsi à Bernard Thibault en tant que
secrétaire général de la confédération.
Il
faut dire que, comme c'était le cas lors du congrès précédent, à Nantes,
l'élection, disons plutôt la nomination du millier de délégués présents avait
été bien organisée. Sous prétexte, une fois encore, de féminiser et de rajeunir
la représentation à ce congrès, on avait écarté bon nombre de syndicats et de
syndicalistes ne se situant pas dans la ligne de la direction confédérale. Il y
avait peu, pour ne pas dire aucune représentation des grandes entreprises qui
sont souvent à la une de l'actualité sociale. Ainsi, mais c'est loin d'être le
seul exemple, le syndicat CGT PSA d'Aulnay-sous-Bois, en grève depuis deux mois
pour la défense de l'emploi, et du coup pour le maintien de leur usine en
Seine-Saint-Denis, n'était pas représenté, ni même invité à prendre la parole.
Cela
aurait d'ailleurs fait tache par rapport au long discours d'ouverture prononcé
par le pas encore secrétaire confédéral Thierry Lepaon, dans lequel, malgré sa
longueur, ne figurait pas le mot « grève » ou « lutte ».
Lepaon a tout de même pris le temps d'énumérer toutes les mesures positives à
ses yeux que le gouvernement Ayrault aurait prises depuis qu'il est en place,
citant l'augmentation de la prime de rentrée scolaire, du smic, etc. Il a donné
au gouvernement socialiste la note « bien », même s'il y a ajouté
l'appréciation « peut mieux faire », afin sans doute de ne pas
paraître trop décalé vis-à-vis des militants de la CGT qui constatent que la
réalité est bien moins rose que celle décrite par le nouveau secrétaire
confédéral.
Mais,
malgré le filtre serré mis en place par l'appareil, celui-ci n'a pas réussi a
faire taire la critique et la contestation, qui ont porté pour une bonne part
sur la mollesse des initiatives de la confédération face aux attaques menées
conjointement par le patronat et le gouvernement contre le monde du travail.
Elles ont également porté sur l'orientation visant, ce n'est pas une nouveauté,
à un rapprochement systématique avec la direction de la CFDT autour de ce que les
dirigeants de la CGT
appellent « le syndicalisme réuni », Lepaon proposant même, pour
l'immédiat, des défilés communs aux deux confédérations pour le 1er mai
prochain. Une initiative qui a tourné court, avant même qu'elle soit
officiellement formulée, le nouveau dirigeant de la CFDT répondant sèchement à
son homologue cégétiste qu'il n'en était absolument pas question. Ces
interventions critiques furent abondamment applaudies, souvent nettement plus
que celles des dirigeants.
Il
ne fallait certes pas s'attendre à des changements, en tout cas dans un sens
plus radical, plus lutte de classe, de la part de la nouvelle direction
confédérale. Elle indique au contraire qu'elle va maintenir le cap à droite. Le
ton choisi par Lepaon laisse fortement penser qu'on le verra, comme son
prédécesseur, plus souvent à l'Élysée et dans les salons que dans les
manifestations et les grèves.
Les
chiffres des votes de ce congrès, que la direction a fournis, ont nettement
avalisé l'orientation choisie par la confédération. Mais les contestations qui
s'y sont fait entendre montrent que cette orientation est de plus en plus mal
acceptée par la base du syndicat. Et c'est cela qui ouvre la seule voie
réaliste pour que le monde du travail ne soit pas défait.
Jean-Pierre VIAL
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